En route pour Lalibela :
La montagne qui chante
Le rêve de tout chrétien d’Ethiopie est de pouvoir célébrer la nuit de Noel à Lalibela, terre sainte pour les éthiopiens orthodoxes. Le mois de janvier est généralement le mois le plus intense de la saison touristique mais cette année, la plupart de nos clients sont enfermés chez eux en Europe. Aussi,en cette année si particulière pour le monde entier, nous en profitons pour nous rendre à Lalibela en emmenant la maman de Tèchou célébrer Genna, la fête de Noel éthiopienne. Sur la route, nous dépassons bus et camions bondés, drapeau au vent. La petite ville de Lalibela est méconnaissable. Une foule compacte se presse partout dans une débauche de musique, des harangues des vendeurs venus expressément pour l’événement, des bergers de tous les environs venus vendre leurs chèvres qui seront au menu de demain après la rupture du jeûne, …
Genna, le Noel éthiopien
Au sein de l’enceinte regroupant les 11 églises de Lalibela, c’est un immense campement de fortune. Nombreux sont les pèlerins qui sont venus à pied, marchant plus d’un mois pour assister à la messe de noël. Tout le monde se presse dans les tunnels étroits ou sur les passerelles reliant les différentes églises entre elles. Il faut faire attention de ne pas tomber. Ici pas de barrière de sécurité. Je quitte un peu le tohubohu et m’installe un peu à l’écart avec une vue sur le mont tabor et Golgota dans lequels sont creusés les églises. Seuls les chants des prêtres relayés par les hauts parleurs me parviennent donnant l’impression que la montagne chante. A mesure que la journée avance, chacun essaie de se trouver un petit endroit où s’installer. Le premier service commence après la nuit tombée et se poursuit toute la nuit. La foule est si compacte qu’on est assis serrés les uns contre les autres à même la pierre. Chacun drapé dans son gebié, une immense toge de coton tissé à la main. La nuit s’éclaire de maigres bougies de cire. A l’aube, la deuxième messe est célébrée en grande pompe. Les ombres blanches s’illuminent petit à petit et les croix cérémonielles scintillent. La ferveur est palpable et se partage indifféremment entre fidèles et visiteurs. Les chants de prêtres sont ponctués de son de corne et de youyous . Les danses sont de plus en plus rythmées à mesure que la procession d’icones et prêtres font le tour de l’église par le haut, répandant l’encens sur leur passage. Afin, vers 9 heure du matin, la bénédiction de noël est donnée et la foule tente de se disperser pour rompre le jeûne en famille.
lalibela, l'éternelle
Aujourd’hui, nous sommes le 8 janvier. Noel est passé. La plupart des pèlerins sont déjà repartis ou sont sur le départ. Un million trois cent milles visiteurs selon la télévision. La petite ville de Lalibela se réveille doucement dans les brumes du petit matin. On peut à nouveau circuler librement à travers les tunnels et tranchées pour accéder aux différentes églises cachées dans les entrailles de la montagne. Je suis des ombres drapées de blanc dans ce dédale de passages. Le sol est inégal et je m’appuie à la roche volcanique rouge. Elle est polie par tous ceux qui avant moi ont fait le même geste. Les marches sont creusées en leur milieu et la pierre procure une douce sensation sous la plante des pieds nus. Soudain, on quitte l’espace confiné et l’obscurité pour déboucher dans la lumière et se prendre en pleine figure la façade d’une église. Tous les bruits sont étouffés, les gens ne font que murmurer. Je m’assied sur le rebord de la pierre. Le temps semble s’être arrêté. Tous les petits soucis, les petits tracas du quotidien le tulmute du monde extérieur semble s’être évaporé. On comprend les moines qui restent ici. Le temps s’écoule différemment ou ne s’écoule plus. Le temps s’est enroulé sur lui-même. Un instant d’éternité dans le présent et le passé à la fois.
Merci
Merci à toute ma famille éthiopienne qui m'a si merveilleusement adoptée.
Un merci particulier à Melkam, ma belle-mère qui est une femme exceptionnelle.